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8 avril 2007

RENCONTRE : 10 (enfin à table)

Il lui avait laissé le choix des agapes malgré des souvenirs douloureux de précieuses qui savaient profiter de cette offre sincère et délégatrice.

Elle avait choisi donc un restaurant pour amoureux de bonne facture, alignement gracieux de tables pour deux, bougies colorées qui animaient les tables de quelques reflets chaleureux, lumière au minimum pour deviner cet autre que l’on voulait voir chavirer sous les effluves d’un verre d’alcool, les couverts étaient dressés avec des brins de paille et la carte montrait un sens certain de l’esthétique et la façon enluminée de décrire des mets laissait augurer d’un voyage aux saveurs inconnues en ces heures lascives.

C’était leur deuxième rencontre et le charme n’opérait déjà pas comme il l’aurait voulu, malgré le rythme différent de l’un et de l’autre, il sentit que le déclic lui échappait comme chaque fois ou presque.

Elle était comme on imagine une femme dans ses rêves les plus visuels, c’était la même  que dans ce bistrot de quartier à éclairage agressif, mais avec le talent de la mise en scène qui te fait chavirer d’entrée un spectateur lambda, et qui te dispense de compliments muets que tu contiens au fond de toi pour éviter les plates bandes des propos anodins dont elle devait posséder la collection complète en dix volumes reliés.

Il fallait donc trouver un angle pour éviter le pire et surprendre plus qu’agacer ? Mais il était fatigué aussi de cette rencontre et la volonté avait fait place à un attentisme désenchanté.

Il la trouvait moins belle en fait et plus fardée, le soleil avait laissé aussi des traces en fin de saison et la peau démontrait une exposition ridicule de par ses ridules et ses expressions figées.

Le charme est une notion masculine, dommage que celui-ci ne puisse accompagner les années où la plastique féminine va laisser place à un combat sans issue où la cosmétique et les artifices audacieux et onéreux, vaillants soldats ne pourront transformer une éphémère attirance en un charisme sain et grisonnant.

Injustice en fait où s’enferment les douces, mais comment faire autrement ?

Elle ne dérogeait pas à la règle et la façon pathétique dont elle essayait de maintenir une fraîcheur enfantine n’avait d’égale que le masque brillant des lueurs assassines que les lucioles complices activaient face au néant.

La magie avait disparu et avec elle une partie de ce désir qui occupe l’esprit le long de ces files automobiles à radio fixée sur le CAC 40 et à imaginaire embarqué.

Face à elle, et dans ce don d’ubiquité qui l’aidait face au désir d’en finir, il laissait revenir au seuil de ces pensées, le souvenir de la lecture ciselée d’une douce courtisane et s’imaginait en découdre avec les mots et la plastique dans un jeu de paume et sans filet.

Il avait une quête, un graal, en fait, réunir en un seul être, une plastique et un talent créatif, mélange de formes et de fond, alchimie du paraître, de la vacuité première et de l’érudition et du savoir, une pincée de dérision qui donnait le ton d’un parcours, une once de recul et une mesure de hauteur sans condescendance.

Voilà ce chemin qui le menait vers l’autre, visiblement, ce soir de plus serait encore le rituel café sans l’addiction mais la courtoisie lui fit entretenir un bon moment et découvrir sous les apparats, un âme sensible, quoi que figée dans des paradoxes qui ne peuvent avoir de sortie sans un réel désir de se savoir muter.

Tout en écoutant la douce se débattre dans des dérélictions, il songeait à la façon que celle-ci pourrait décrire ce moment de vie, et si elle possèderait le talent pour tenir en émoi le lecteur anonyme qui se verrait ainsi dans ces histoires anodines.

Quelques instants plus tard, ils firent quelques pas à l’abri de ruelles ruisselantes, la pluie printanière ajoutée aux reflets des quelques véhicules égarés donnait un cadre idyllique pour un ultime baiser, elle l’enlaça comme pour le remercier de ce moment hors du temps, ils s’embrassèrent en silence et en volupté, lui savait le coté définitif de cet ultime rendez-vous, mais savourait enfin ces moments indécis où tout bascule enfin et où les émotions, pulsions et désirs se mélangent annonçant à venir des effluves de plaisir……………………………………..

 

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